Les limites des outils analytiques existants

Trois principales limites sont observées :

·    Ces analyses ne couvrent que 3 grands aspects du règlement bio : la détection et quantification de résidus de produits phytosanitaires, la détection des résidus de produits vétérinaires dans les produits carnés et la détection des OGM. D’autres spécifications clés de l’agriculture biologique (exemple :  rotation des cultures, recyclage des matières organiques, bien-être animal) ne peuvent être testées analytiquement à ce jour.

·    Deuxièmement, l’approche technique suivie est celle d’une analyse ciblée. On cherche à détecter la présence de produits connus au préalable. Par définition, cette approche ne permet de détecter que ce qu’elle cherche. D’une part, le spectre des éléments que l’on recherche est relativement limité (pesticides, OGM, médicaments vétérinaires…). D’autre part, si des produits différents sont utilisés, comme par exemple des pesticides modifiés chimiquement, il est possible que les analyses ne détectent pas les échantillons comme non-conformes.

·    La troisième limite observée est que les analyses réalisées peuvent donner des résultats équivoques sur le respect du cahier des charges de l’agriculture biologique. En effet, il est possible qu’un produit alimentaire positif pour l’une de ces analyses ait pourtant été produit selon ce cahier des charges Bio (vs contamination croisée, etc). Au contraire, certains produits conventionnels peuvent donner un résultat négatif sur ces analyses et donc être confondus avec des produits authentiquement biologiques, si l’on se limite à ces méthodes.

 

Typologie des innovations envisagées

La vocation du projet TOFoo est donc de développer des analyses innovantes permettant d’assurer l’authenticité du caractère « bio » des produits alimentaires tout au long de la filière.

Celles-ci incluront des méthodes qui recueillent l’empreinte analytique globale des produits et vérifient leur caractère « bio » (approche « non-ciblée »), mais aussi des méthodes d’identification d’additifs alimentaires non-autorisés dans la bio et de caractérisation des nanoparticules manufacturées. Elles seront appliquées aux produits végétaux (fruits, légumes, céréales, oléo-protéagineux) et laitiers.

Des analyses in situ complèteront ces analyses de laboratoire, permettant des contrôles rapides et fréquents directement sur les sites industriels ou de distribution. Réalisées via des appareils portables d’analyse, elles seront destinées à fournir des pré-alertes sur l’intégrité des produits, à confirmer par les méthodes de laboratoire.

Enfin, pour permettre le développement de ces nouvelles analyses, chaque partenaire contribuera à l’émergence de nouvelles solutions : développement des appareils portables d’analyse rapide in situ, amélioration des performances des équipements de laboratoire avec des technologies émergentes, constitution et exploitation de bases de données de plusieurs milliers d’échantillons grâce à des traitements statistiques innovants à la croisée du « big data » et de l’intelligence artificielle.

Pourquoi des méthodes non-ciblées ?

Le principe sur lequel reposent les analyses non-ciblées que nous réalisons est qu’il existe une différence de composition chimique entre les produits biologiques et les produits conventionnels. Cette différence proviendrait de pratiques agricoles distinctes entre le bio et le conventionnel, qui auraient une influence sur le métabolisme de la plante ou de l’animal, et donc sur la composition finale des produits alimentaires. Ce postulat est étayé par la littérature scientifique, synthétisée notamment dans deux méta-études, l’une sur les cultures et l’autre sur les produits laitiers [1,2].

L’objectif des méthodes non-ciblées est d’identifier ces différences sans a priori, en comparant les empreintes analytiques générales des produits Bio et Non-Bio.

Pour cela, nous construisons des banques de données analytiques provenant de plusieurs milliers d’échantillons. Nous cherchons ensuite à extraire des marqueurs du caractère « bio » parmi la grande variabilité des produits alimentaires, liée à leur variété, à leur origine géographique, à la météo de l’année de production, etc.

 

1.           Barański M., Średnicka-Tober D., Volakakis N., Seal C., Sanderson R., Stewart G.B., Benbrook C., Biavati B., Markellou E., Giotis C., Gromadzka-Ostrowska J., Rembiałkowska E., Skwarło-Sońta K., Tahvonen R., Janovská D., Niggli U., Nicot P. & Leifert C. (2014). – Higher antioxidant and lower cadmium concentrations and lower incidence of pesticide residues in organically grown crops: a systematic literature review and meta-analyses. British Journal of Nutrition, 112 (5), 794–811. doi:10.1017/S0007114514001366.

2.           Palupi E., Jayanegara A., Ploeger A. & Kahl J. (2012). – Comparison of nutritional quality between conventional and organic dairy products: a meta-analysis. J Sci Food Agric, 92 (14), 2774–2781. doi:10.1002/jsfa.5639.